À Oran et exactement dans certain quartiers populaires tels que les Planteurs, Sidi Lahouari ou la cité Belgaid, les taxis clandestins, appelés communément “fraude”, font partie intégrale de l’offre de transport et de l’image de la ville. En banlieue, leur part de clientèle est importante, car le taux de motorisation y est plus faible, la densité de population est relativement élevée, tandis que l’offre de transport est moins dense. En ville, ces taxis circulent soit sur les grands axes et se placent en concurrence directe avec les taxis réguliers, soit sur des trajets mal desservis par les autres modes et se placent alors en complémentarité (seuls sur le marché). “Toute personne ayant un véhicule peut se lancer” dans une activité lucrative qui échappe à l’impôt, explique un ancien fonctionnaire à la retraite et taxieur clandestin depuis plus de 10 ans. Le taxi fraude se démarque par son confort relatif, et sa rapidité de déplacement (comparé aux bus) et surtout sa disponibilité à tout moment de la journée et de la nuit, ainsi que le choix de toutes les destinations, même en dehors de la wilaya. L’aspect lucratif de l’activité explique en partie son succès. Il s’agit, pour ceux qui font ce choix, d’un moyen rapide de se faire de l’argent, puisqu’il évite le paiement des charges, impôts, taxes, droits d’exploitation. “En quelques mois, ils peuvent rembourser le coût du véhicule et rester ensuite à leur compte aussi longtemps qu’ils le désirent”, affirme tranchant Sid-Ahmed, un chauffeur de taxi légal. “Les taxis en règle, en revanche, font face à des dépenses professionnelles importantes”, ajoute-t-il. Du côté des usagers, le recours au taxi clandestin n’est pas un choix systématique, mais une contrainte, surtout la nuit ou pour se rendre dans certaines régions mal desservies par les transports publics et privés de voyageurs. “La nuit, il est impossible de trouver un taxi”, se plaint un habitant du centre-ville d’El bahia. “À ce moment précis, les ‘fraudes’ prennent le relais pour assurer en toute quiétude la liaison de plusieurs quartiers désertés la nuit par les taxis autorisés en proposant leurs services et leurs tarifs”, ajoute-t-il. Pour les urgences médicales, même tard dans la nuit, ce sont les taxis clandestins qui assurent, s’accordent à dire plusieurs habitants. En effet, ce qui semble gêner le plus les noctambules et les travailleurs de nuit, est l’absence récurrente des taxis de permanence. Des dizaines d’ouvriers se voient contraints de recourir, chaque nuit, aux services des fraudeurs, alors que la réglementation stipule que chaque taxi doit marquer son tour de permanence. De leur côté, ces chauffeurs clandestins, parlent du manque d’autorisations pour un exercice légal de cette activité. “Nos voitures ne sont pas volées. Nos cartes grises sont en règle. Nous avons déposé nos dossiers à la direction du transport pour circuler légalement. Mais on nous dit que nous n’avons pas de ‘carte’ pour avoir l’autorisation”, s’indigne Mohamed, 36 ans, chauffeur de taxi clandestin, depuis une dizaine d’années. Dans tout cela, une question est en droit d’être posée : “Où est donc la faille ?”
